01 avril 2010

Les déboires de Toyota remettent-ils en cause le TPS ?

Par Xavier Perrin (xperrin@xp-consulting.fr)

Au cours de ces dernières années, le Système de Production Toyota (TPS), qui constitue la base de l'approche lean manufacturing, est devenu la référence en matière d'excellence industrielle. Or, depuis le début de cette année,  Toyota  a du rappeler 8,7 millions de véhicules (à comparer à une production annuelle d'environ 6,5 millions d'unités). Quelles conclusions tirer cet évènement ? Le lean manufacturing, approche incontournable citée à tout va dans la presse spécialisée et sur tous les sites web  et autres blogs consacrés à l'industrie, serait-il un leurre ? Comment l'approche lean, qui préconise la qualité comme préalable non négociable, peut-elle conduire à un tel fiasco ?

Je me garderai bien de faire quelque hypothèse que ce soit quant aux causes de ces problèmes, ne disposant  d'aucun indice sur le sujet. Par contre, je peux évoquer l'approche lean en tant que "praticien" et "expert".

Comme le faisait remarquer un confrère (américain !), serions-nous prêts à remettre en cause les principes du calcul des besoins nets (MRP) quand les nomenclatures utilisées sont incorrectes ? Evidemment non ! La faille n'est donc pas à chercher dans le TPS lui-même mais dans la façon dont il est utilisé.

Le management de la qualité est  représenté par le deuxième pilier du TPS, que l'on nomme Jidoka. Jidoka inclut l'idée de stopper la production dès qu'une non-conformité est produite plutôt que de la transmettre aux opérations suivantes. L'arrêt de production et ses conséquences sont alors considérés comme une opportunité pour identifier et éliminer définitivement les causes du problème et donc stabiliser la production. Ce principe, qui fait partie de la culture de Toyota depuis des décennies,  est redoutable d'efficacité mais terriblement difficile à mettre en application dans nos entreprises, surtout quand on a jusque là favorisé l'adaptabilité des opérateurs et leur capacité à réagir pour contourner les problèmes. En conséquence, les problèmes rencontrés par Toyota pourraient être dus à la non-application du TPS et certainement pas au TPS lui-même. L'attitude de Toyota qui rappelle systématiquement ses véhicules prouve par ailleurs que, quels que soient les problèmes rencontrés et leurs conséquences, on ne transige pas avec la non-qualité et on ne prend pas le risque de faire subir ses problèmes au client final. De ce point de vue aussi, l'attitude de Toyota est parfaitement conforme avec son TPS.

En se basant sur les éléments communiqués par la presse, il ne semble pas que les problèmes rencontrés sont dus à une mauvaise qualité de réalisation, mais plus vraisemblablement à des dysfonctionnements dans les phases de conception. C'est sans doute ses processus de conception, contraints par la nécessité de réduire les délais de mise sur le marché (Time-To-Market), rendus complexes par la taille de l'entreprise et son contexte multiculturel, que Toyota va devoir reconsidérer.

Commentaire(s) sur "Les déboires de Toyota remettent-ils en cause le TPS ?"

  1. Bonjour Eichi,

    Je me réjouis d'une telle contribution qui diversifie les points de vue.
    Je vais m'empresser de lire votre livre !

  2. Après lecture de l'ouvrage de Eichi Kobayashi, The truth about Toyota, je ne peux qu'en recommander la lecture, indispensable à tous ceux qui s'intéressent à l'approche lean et surtout, à ceux qui l'enseignent !
    Mon commentaire sur Amazon.com : "There are so many books written about Toyota and its TPS today, mainly presenting only positive and spectacular issues about the firm. Eichi Kobayashi has produced a highly intersting and usefull book, which should be red by all person using or teaching the lean approach."

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